Je vais parler comme une vieille ronchon alors.
Mon premier patron est vieux de 1987 ! Un Burda pochette.
Un jour, j'ai compté combien j'avais de patrons : plus de 500 ! J'en ai revendu (beaucoup) depuis. C'est cette possibilité de revente qui fait que j'affectionne les patrons papier aux PDF d'ailleurs.
PM me dit que j'ai revendu pour 3600€ de livres, magazines et patrons depuis le début...sans compter les puces créatives pour le matériel, les tissus.
Clairement, je ne coudrai jamais tous les patrons en stock. Sans parler de mes burda magazines et autres magazines couture et des livres.
Après, c'est une passion (avec le crochet) donc je ne me positionne pas sur une ligne directrice d'utilité/besoin/nécessité. Cela veut dire que j'en achèterai encore alors que j'ai un grenier rempli.
Pour moi, il n'y en aura jamais assez. Déjà parce qu'il y a des marchés de niche encore peu explorés : la lingerie et le balnéaire, l'homme, les grandes tailles, sports/dance, les costumes, les tenues traditionnelles (d'Afrique, d'Asie), la haute couture (une belle veste Chanel dans les règles de l'art ou un tailleur de style Bar) ou bien styles peu explorés : le travail du biais à la Vionnet, le travail des tissus transparents (pour la lingerie), le travail du tailleur (il commence à y avoir de l'offre) ou des tenues business pour homme (le mien fait 3XL...dur de trouver de jolies chemises dans de jolies tissus qui soient en regular et non cintrées), une mode pour 3e âge qui ne soit pas ringarde mais plus décontractée chic par exemple.
Moi, je regrette par exemple qu'il n'y ait pas une Beverly Johnson française et je n'ai pas les moyens de m'offrir de cours particuliers avec Louise Feuillère.
Après tu évoques le mélange des genres et des réseaux sociaux. Clairement, il ne faut pas être dupe : c'est du digital marketing de masse où les frontières ne sont pas clairement et officiellement définis. Par exemple, le nombre de bloggueuses et d'instagrameuses qui reçoivent à titre gratuit des patrons, matériels, fournitures sans l'annoncer et qui continuent de proclamer haut et fort qu'elles sont totalement objectives :))))
1) ce n'est pas parce que c'est écrit que c'est vrai ;
2) ce n'est pas parce que ce sont d'anciennes bloggueuses couturières qu'elles conservent le statut d'amatrices (dans le sens de "gratuit") une fois leur marque lancée.
3) ce n'est pas parce qu'elles communiquent soit-disant d'égal à égal sur le même canal qu'il y a une proximité et qu'elles doivent se soustraire aux règles du commerce, du SAV et que les critiques de consommatrices s'achètent ou se taisent.
4) ce n'est pas parce qu'elles affichent une formation professionnelle dans le stylisme ou le modélisme (si toutefois c'est vrai), qu'elles font de bonnes patronnières, de bonnes commerçantes.
Je peux t'en parler de patrons achetées auprès d'un CV pro vanté sur le site ecommerce et qui ne vaut pas tripette car il manque des informations.
---> plutôt que de beaucoup ou trop de patrons, je dirais qu'il y a beaucoup de patrons réalisés avec amateurisme, à des prix qui eux, ne le sont pas. Et des comportements de commerçants qui ne respectent même pas la législation de la VPC.
Question philosophique, est-ce qu'il n'y a pas trop de patrons ?
J'ai l'impression d'être noyée par les propositions. J'éprouve une sorte de saturation. Une sensation de trop. Trop de sorties de patrons, trop de réalisations similaires visuellement.
Et un désagréable sentiment d'être prise, finalement, pour un porte monnaie. Je fais presque une réaction de rejet de ce monde virtuel de la couture.. Je ne me reconnais plus dans cet espace trop normé, trop marketé, où tout le monde coud le même patron, au même moment avec le même tissu. Un monde trop mercantile avec des patrons ultra chers, des tissus chers également et une créativité assez pauvre. Je ne me reconnais pas ces textes sans sincérité où tout le monde de la couture indépendante (indépendante de quoi ?) se congratule à chaque photo publiée sur instagram. J'ai le sentiment d'un marché complètement saturé où chaque créateur en puissance voit la possibilité d'un eldorado à chaque patron créé.
Et cela me rend triste. La blogosphère couture (puisqu'on l'appelait comme cela) m'a tellement apporté. Moi qui cousait depuis toujours et qui en avait un peu honte (loisir de mémé…), j'ai pu échanger et voir que je n'étais pas seule. Et puis tout cela a été rattrapé par le monde commercial. Les filles géniales qui créaient de superbes vêtements pour elles et nous donnaient envie, se sont mises à vendre des patrons et a avoir des plans marketing. Bien sur certaines, plus créatives que d'autres, peut-être mieux formées aux métiers du vêtements ont créé de jolies marques de patrons, mais finalement quelle différence avec les patrons dits traditionnels? Ils sont souvent plus chers, parfois mieux expliqués. Mais a mes yeux, la seule vraie différence c'est qu'ils ont été créés par des filles qui nous ressemblent, que nous avons l'impression de connaitre et que nous avons du mal a prendre du recul face à ces produits.
Mais dans la vraie vie je n'ai pas un budget illimité, je n'ai pas un temps énorme à consacrer à la couture et il sera toujours plus facile et rapide de transformer un vieux patron Burda/ottobre déjà décalqué pour le moderniser et le mettre au gout du jour.
J'espère que cet espace virtuel sera toujours libre, créatif, un remède à la surconsommation, et un moyen de prendre le contrôle sur l'industrie du vêtement qui veut nous imposer ses diktats en exploitant des gens a l'autre bout du monde. Je continuerai a être attentive aux sorties des nouveaux patrons et à attendre un coup de cœur. Mais je ne suis pas dupe.
J'aimerai savoir si je suis une vieille ronchon ou si d'autres partagent mon sentiment ?